Une rose des Editions de parfums Frédéric Malle : Rose intense et sèche

lundi 21 mai 2018
par  Lavinia

JPEG - 39.6 ko

Une rose des Éditions de parfums Frédéric Malle (photo tirée de mon compte Instagram)



La difficulté avec les parfums à la rose est de savoir comment équilibrer leur facette sucrée avec quelque chose d’intéressant. Nous aimons tous l’odeur des roses rouges, mais, pour beaucoup, ne préférerions pas la sentir sur nous à longueur de journée. Ce qui est beau dans la nature ne l’est pas forcément comme vêtement ou parfum. Qui voudrait s’adorner de roses des pieds à la tête ou se déguiser en rose ? Réponse : Paris Hilton.



JPEG - 36.7 ko

Costume de la fin du 18ème siècle

JPEG - 5.9 ko

Paris Hilton



Voilà me semble-t-il la raison de mon désenchantement avec Red Roses de Jo Malone. Je le combine volontiers avec d’autres parfums, lorsque je veux souligner leur note de rose, mais le trouve de mauvais goût porté seul. Point de méprise : j’adore les parfums à la rose, mais ne souhaite pas pour autant, me transformer en rosier ambulant, comme le faisaient les femmes fleur du 19ème siècle jusqu’au années 20s. C’est pourquoi Chanel critiqua les parfums à la rose de façon aussi cinglante.



JPEG - 33.2 ko

Auguste Toulmouche (env 1870)



Aussi le principe des Éditions Frédéric Malle étant de donner aux nez la liberté de créer, il paraît étonnant, à première vue, qu’Édouard Fléchier, l’auteur de Poison, choisit de faire le portrait d’une rose en 2003. Il existe pléthore de soliflores rose sur le marché dont certains sont très beaux. Il s’agit d’ailleurs de la fleur la plus explorée au siècle dernier sous toutes ses nuances de couleur.



JPEG - 11.4 ko

Parfums à la rose (trulygeeky.com)



JPEG - 15.2 ko

La ligne Red Rose de Bulgaria (shopbulgaria.com)



De plus, le genre se prête à un certain classicisme plutôt qu’aux audaces avant-gardistes. Pourtant, Fléchier réussit à peindre une énorme rose rouge sans sentimentalité aucune, comme la Pop Art met en scène les objets du quotidien.



JPEG - 6.6 ko

Andy Warhol, untitled red rose, (vers 1955)



La qualité de la matière première est toujours de nature à inspirer les créateurs. Pour Une rose, Fléchier aurait disposé d’huile de rose turque, connue pour son odeur extrêmement riche et profonde, avec des facettes miellées, légèrement épicées, le tout représentant la rose rouge de façon admirablement réaliste. Elle a une note de vin rouge et de tanins sans que l’on sache d’où cela vienne.



JPEG - 6.6 ko

Huile essentielle de rose (sedonaaromatherapie.com)



JPEG - 3.6 ko

Vin rouge (elle.fr)



Selon Luca Turin dans The Guide, la distillation se serait effectuée à faible température sous vide poussé. Or ce processus permet de séparer et, a fortiori, de sélectionner les molécules odorantes voulues de façon plus discriminatoire à partir de l’huile de rose. Au résultat, Une rose exprime l’intensité, l’opulence et la profondeur de cette fleur.



JPEG - 12.2 ko

Rose rouge (wikipédia.com)



Il s’agit d’un parfum sec et chaleureux, non d’une rose verte, fraîche et aérienne, évoquant la rosée du petit matin. C’est pourquoi on imagine ses pétales cramoisies, les contours noircis, brûlés par le soleil.



JPEG - 5.8 ko

Pétales de rose rouge (petitingrédient.com)



Une note de miel sombre vient encore renforcer l’idée d’une rose rouge et l’illusion est parfaite. Une odeur de rose épanouie se diffuse puissamment.



JPEG - 5 ko

Miel (mariefrance.fr)



Cependant, Fléchier évite son côté trop sucré avec un mystérieux accord ‘truffe’, en note de fond, composé de vétiver, de patchouli et de castoréum. La rose rouge en devient terreuse, avec des accents fumés et cuirés, ajoutant à la chaleur sèche du parfum, tout en équilibrant son côté doux avec des notes rappelant la terre où s’enfoncent les racines de l’arbuste.



JPEG - 10.1 ko

Racine de vétiver (numero.com)



Il y a là aussi, juxtaposé avec la rose, en note de cœur, du géranium, qui me frappe toujours comme étant un peu acide. Fragrantica l’identifie comme étant du pélargonium, avec des notes citronnées. Pour ma part, je ne sens pas de citron dans le géranium, mais plutôt une note à la fois verte et terne, qui me rappelle les accords fougère.



JPEG - 9.6 ko

Pélagornium (sysbio-univ-lille1.fr)



La rose rouge, si féminine, prend un tour plus équivoque. Le géranium, certes, se révèle beaucoup moins présent que dans Or et Noir de Caron (1949) : Une rose n’a rien de rétro-chic. Résolument moderne, le parfum de Fléchier n’évoque pas les boutons de rose, comme celui de Michel Morsetti, mais une rose ouverte et entêtante, à force d’exposer ses pétales soyeux au soleil.



JPEG - 8.6 ko

Rose rouge (theenglishgarden.co.uk)



J’aime porter Une rose au printemps ou en automne lorsqu’il fait un peu frais. Le parfum étant à la fois excessif, dans le bon sens du terme, sobre, je l’accorde avec des vêtements simples mais bien coupés. Une rose me convient aussi avec une tenue de soirée sombre comme lui.



JPEG - 14.5 ko

Rose rouge (unsplash.com)



Notes de cœur :

Rose turque, Géranium et Vin rouge



Notes de fond :

Vétiver, Patchouli et Castoréum