Rive gauche pour homme (vtg 2000 & actuel)

jeudi 29 juin 2017
par  Lavinia

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Rive gauche pour homme (vintage 2000)


Lancé en 2003, par Yves Saint Laurent, Rive Gauche pour homme change de l’ordinaire. Il ne s’agit pas d’un fougère aromatique, redéfini aux marges, par l’ajout de quelques notes modernes. La composition de Jacques Cavalier se distingue surtout par la subtilité donnée aux senteurs de savon de barbier. Généralement, ce même mélange de lavande, de géranium, de coumarine et de mousse chêne dégage, en effet, une odeur forte de produits d’hygiène masculin sur fond de sous-bois synthétiques. Rive Gauche, au contraire, fait l’effet d’une mixture lisse et fine. La masculinité du parfum en devient discrète et raffinée sans rien perdre du classicisme des fougères aromatiques destinés aux hommes.

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Publicité pour Rive Gauche


Les notes de tête, de la bergamote, du romarin et de l’anis, assurent un départ vif, vert et frais, légèrement épicé et liquoreux. Cependant, par la suite, ni le romarin, ni l’anis ne se démarquent nettement de cette fusion de senteurs à la fois camphrées et fleuries qui caractérisent Rive Gauche. Seule la bergamote, très en évidence, traverse tout le parfum où se diffuse son odeur douce et zestée. La raison en est que la lavande et le géranium rejoignent très vite les notes de tête et mettent l’accent sur la fraîcheur lavandée, fruitée et un peu florale de la bergamote, non sur l’amertume du romarin.

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Bergamotes


De plus, la lavande et le géranium s’équilibrent de façon subtile. Dans la tradition des barbiers, l’arôme fusant du lavandin, qui règne sur nos lessives et savons, l’emporte habituellement sur la senteur rosée du géranium. Seulement, en travaillant la facette florale de la lavande et le côté mentholé du géranium, Cavalier obtient un tout autre résultat. Rive Gauche n’a pas l’odeur d’une propreté agressive, mais un rendu frais, doux et fleuri. La lavande se révèle au travers de touches de menthe et d’odeurs de rose comme une fleur vert tendre légèrement poivrée.

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Géranium bourbon


La toute prochaine étape (car le parfum se développe très vite) se détermine par l’arrivée du clou de girofle, délicatement dosé, au côté de la coumarine. Rive Gauche prend alors un tour presque fumé et définitivement plus amer. Tout se joue entre l’odeur épicée du clou de girofle et le poudré de la coumarine avec ses relents de foin et de tabac boisé. Le parfum se réchauffe, gagne en force, mais reste sobre. D’une part, la douceur de la coumarine, d’autre part le piquant du clou de girofle laissent transparaître une lavande à la fois balsamique et herbacée.

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Lavande fine


L’ensemble est propre, pourtant, il ne se transforme pas en savon. Afin de lui donner un petit air oriental, le clou de girofle prend le relais de l’anis, et rejoint le patchouli, en note de fond.

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Clou de girofle


Cette note de patchouli, très discrète au demeurant, s’associe à la mousse de chêne et apporte un petit côté terreux à Rive Gauche. Pour une fois, l’odeur humide des sous-bois n’est pas étouffée par la rudesse des cosmétiques masculins désodorisants. Une note de bois de Gaïac doucereuse et un peu de musc renforcent cette impression de moisi, mais n’y tombe jamais, parce que un vétiver sec s’harmonise avec les notes fraîches de la bergamote, de la lavande et du géranium.

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Mousse chêne dans le sous-bois


Ainsi les notes de fond parcourent toute la gamme des bois, soulignés par un musc cacaoté (je pense qu’il s’agit d’habanolide) sans qu’aucune de ces senteurs ne domine. Cela fait l’effet d’une masculinité délibérément minimisée, tranquille et sûre d’elle. Sans timbales ni trompettes, Rive Gauche ressemble à une musique mixée où la fréquence des instruments de percussion serait diminuée, voire remplacée par des rythmes programmés, servant de fond sonore à des nappes mélodiques de guitare. Plus encore, le downtempo avec des modifications légères, typique du smooth jazz, décrit bien le rendu d’une eau de toilette dans laquelle l’accord fougère ne souffle pas des odeurs amères et savonneuses à plein volume, mais les atténuent et les fusionnent de façon à composer un ensemble mélodieux.

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Rive Gauche se porte facilement. Sa délicieuse note de coumarine à l’odeur de foin et de noisette se marrie avec celle du musc chocolatée pour lui donner un petit quelque chose de gourmand, totalement inattendu dans un fougère visant le marché masculin.

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Coumarine (fleur)


Au résultat, il s’agit d’un parfum polyvalent que tout le monde peut s’approprier dans une volonté de dépouillement et de réserve, qui montre, à vrai dire, une belle assurance. Dans cet esprit, je ne vois pas d’occasion ou de tenue inappropriés pour Rive Gauche, sauf celles où l’on se veut clairement séducteur.

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Noisette


Notes de tête :

Bergamote, Anis et Romarin

Notes de cœur :

Lavande, Géranium, Clous de Girofle et Coumarine

Notes de fond :

Patchouli, Muscs, Bois de Gaïac, Mousse de Chêne et Vétiver



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Rive gauche pour un homme (actuel reformulation de 2011 )


L’ouverture de la version reformulée déçoit, dû à son manque de relief. Sans la bergamote et l’anis, on se retrouve immédiatement avec une lavande boisée sans beaucoup de caractère. Et ce d’autant plus que la coumarine à l’arôme de noisette a elle aussi disparu. De plus, en notes de fond, je distingue encore le patchouli et le bois de gaïac, mais non plus la mousse de chêne, ce qui empêche la note ‘fougère’, listée par Fragrantica, d’évoquer les sous-bois humides.

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Fougères dans le sous-bois


Les rares descriptions du nouveau Rive Gauche que j’ai pu lire m’ont beaucoup étonné. Le départ semble plus vert à nombre de personnes, alors que les notes vertes me paraissent, au contraire, perdues. Pis, cette version de l’eau de toilette, régulièrement décrite comme étant moins savonneuse et plus ronde, me semble justement moins subtile et plus proche des senteurs traditionnelles de barbier surtout après quelques heures d’évaporation. En fait, la note rosée de géranium étant atténuée et la coumarine absente, la lavande prend un tour nettement hygiénique et grossier. Aussi le rendu n’est-il guère subtil, comme dans la première version, mais bien plus grossier.

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L’explication la plus vraisemblable de cet effet reste que les ingrédients doivent être de moins bonne qualité. Même la facette sucrée du bois de Gaïac ne se distingue pas parmi des notes boisées plus lourdes. Pourtant, il est vrai de dire que la reformulation et l’original restent assez proches, la différence entre elles se remarquant surtout d’un point de vue qualitatif. Pour résumé, on pourrait dire que le nouveau Rive Gauche est à l’ancien ce qu’un remake américain est à la version originale d’un film : moins de finesse et plus de force. En effet, les testant sur mouillettes, il m’est apparu que la nouvelle version comporte moins des notes, mais que celles-ci, plus puissantes, durent plus longtemps.

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The vanishing de George Sluizer (1988-93) : un des pire remake jamais


Notes : Fougère, Géranium, Lavande, Patchouli, Bois de Gaïac et Muscs.


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