En passant des Éditions Frédéric Malle : Lilas subtil et aérien

samedi 22 avril 2017
par  Lavinia



Lancé en 2000, En passant enchante les amateurs de lilas recherchant un parfum qui ne rappelle pas les notes écœurantes des produits ménager. A dessein, Giacobetti a composé un soliflore aérien, contournant ainsi l’effet de saturation souvent provoqué par les molécules de synthèse utilisées dans les lilas et les muguets.



Lilas pourpre

Après un début frais et vert, une note de lilas transparaît, portée par un courant d’air, puis ce sont des grappes de fleurs, pendant des arbustes, qui nous transportent dans un printemps de rêve. Il y a là un effet de scène très réaliste. En s’approchant d’un lilas, on sent d’abord une légère odeur fleurie, avant même de voir les fleurs. Celle-ci devient très intense lorsque l’on passe devant. Cette impression forte d’une multitude de fleurs marque la mémoire même si l’on passe sans s’arrêter.



Lilas mauve

Selon le site des Édition de Frédéric Malle : « Olivia Giacobetti a voulu capturer cette « odeur divine que l’on pouvait sentir au-delà des murs des jardins, dans les rues du Paris de Robert Doisneau ». » Pour la note, il faut savoir qu’à Paris, la plupart des jardins restent des espaces clos, alors qu’à Londres, New York ou Berlin, il existe plus de grands parcs publiques. Le Paris de Doisneau, photographe, né en 1912 et mort en 1994, est surtout celui des enfants courant dans les rues et autres passants. Giacobetti rend bien la même idée de mouvement et de passage que l’on trouve dans ses photos des années 50.



Robert Doisneau, Le lilas de Ménilmontant, (1957)

Aussi En passant traite d’un thème original : les jardins clos détectés de l’extérieur, d’abord par leur senteur, puis peut-être par un arbuste, qui dépasse des murs, bien qu’à Paris, les jardins privés restent bien contenus dans des cours intérieures. C’est d’ailleurs pourquoi on ne fait que passer, même si une odeur de lilas nous interpelle un instant.



Magritte, The Flash (1958)

Exclus d’un paradis inaccessible, on en reçoit, néanmoins, un signe en cadeau. Cela arrive aussi dans les rues et sur les esplanades où l’on ne fait que passer, toujours pressé par le temps. En passant est donc d’un parfum impressionniste dont le style convient parfaitement à la fleur de lilas, toujours composée au moyen d’artifices, puisqu’elle demeure muette.



Lilas des Indes, place de Rungis

Pour son soliflore, Giacobetti a pris le parti d’éviter la facette amandée, sucrée et crémeuse du lilas, caractéristique de sa variété blanche. C’est pourquoi, malgré la note annoncée, En passant suggère plutôt le lilas mauve, pourpre ou rose. Car ce parfum, plutôt vert, n’a rien de crémeux comme les lilas blancs.



Lilas blancs et mauves

En notes de tête, les feuilles d’oranger dégagent des effluves fraîches, très vertes, et l’absolue de concombre donnent une impression d’humidité. On imagine alors que la pluie vient de tomber sur l’arbre, chargé de feuilles et de fleurs inondés d’eau, dont l’air apporte le senteur fraîche jusqu’à nous.



Feuilles d’oranger des osages

Progressivement, l’absolue de blé se révèle un peu. Pour beaucoup, il s’agit d’une note de pain qui en vient à dominer la composition étouffant le lilas ; personnellement, je ne sens qu’une touche de blé, avec un léger relent fariné, qui vient équilibrer les notes vertes et humides.



Blés

Après la pluie, un soleil timide tente de sécher l’arbuste, le beau temps revient et c’est aussi cette impression printanière d’une alternance perpétuelle entre la pluie et le beau temps qui parvient à nous à travers de ce parfum. En passant saisit parfaitement le passage : celui des gens qui passent devant un lilas invisible, celui de leur instant d’émerveillement, celui de soleil qui réapparaît et, enfin, celui des saisons de l’année, où le printemps fait la transition entre l’hiver froid, lorsque les fleurs se cachent, et la chaleur de l’été avec laquelle leurs senteurs remplissent l’air à plein volume.



Monet, Lilas au soleil, (1872)

Monet, Les lilas, temps gris, (1872)

En passant se révèle donc être un soliflore sophistiqué. Il n’en demeure pas moins lumineux tel l’air, lavé par la pluie, colportant des arômes clairs de pousses vertes et de fleurs écloses. Je pense qu’il peut donc se porter avec tout genre de tenue, au printemps, de préférence par temps ensoleillé, car le parfum s’ouvre comme une fleur dès qu’il fait chaud.



Fleur de lilas pourpre

J’irais même jusqu’à dire qu’il sent meilleur en plein air. Aussi En passant apporte-t-il un brin d’élégance lors des garden-party, des barbecues ou des pique-niques courants à la saison des lilas. Car cette fragrance reste discrète avec sa bonne tenue et manque de sillage. Je m’en sers, de jour, comme parfum de peau, lorsque je désire être un brin sophistiquée, sans que cela ne se détecte franchement, dans la pleine lumière d’un jour de printemps.



Monet, Le déjeuner sur l’herbe, (1866)

Notes de tête :

Absolue de Concombre et Feuilles d’oranger

Notes de cœur :

Lilas

Notes de fond :

Absolue de blé et Musc Blanc


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